Des armes vendues récemment au gouvernement Burkinabè entre les mains de groupes armés

Des armes qui ont été “vendues récemment” au gouvernement burkinabè se retrouveraient entre les mains de groupes armés opérant dans le Sahel, ont indiqué des experts en armements de l’organisation Amnesty International dans un rapport d’enquêtes publié mardi. Ces experts disent avoir identifié des armes de fabrication serbe dans des vidéos publiées par des groupes armés opérant dans le Sahel, notamment un groupe affilié à l’organisation État islamique qui a revendiqué, disent ils, la mort de centaines de civils.

Amnesty International dit avoir recueilli et analysé plus de 400 contenus numériques en provenance du Burkina Faso et du Mali, dont des photos et des vidéos authentifiées, publiées sur les réseaux sociaux par des membres de groupes armés entre janvier 2018 et mai 2021. Ces images montrent des stocks d’armes, ainsi que des fusils entre les mains des combattants de divers groupes armés dont l’EIGS, le GSIM, les Dozos, les Volontaires pour la défense de la patrie (VDP), les Koglweogo et Dan Ambassagou, à la fois au Mali et au Burkina Faso.

« Les nouveaux fusils, certains étant les modèles les plus récents qui existent, correspondent à des transactions entre la Serbie et le Burkina Faso, ce qui laisse à penser que ces armes ont été vendues récemment au gouvernement burkinabè avant de tomber entre les mains de groupes armés », a affirmé l’organisation dans son rapport consacré à la provenance des armes entre les mains des groupes armés au Sahel.

Pour l’organisation, s’il s’est avéré impossible de retracer précisément la chaîne de responsabilité, il est fort probable que ces armes aient été détournées vers des groupes armés, soit par des canaux illicites soit par des prises sur les sites des affrontements ».

« L’analyse effectuée par Amnesty International des données relatives aux transactions commerciales montre aussi que la République tchèque, la France et la Slovaquie exportent de grandes quantités d’armes légères et de petit calibre aux gouvernements du Sahel depuis que cette région est le théâtre d’un conflit généralisé », souligne le rapport.

« Entre 2015 et 2020, la Serbie a indiqué dans ses rapports annuels au Traité sur le Commerce des Armes (TCA) avoir transféré au total 20 811 fusils et carabines, 4 000 fusils d’assaut, 600 revolvers et pistolets à chargement automatique, et 290 mitrailleuses au Burkina Faso », a relevé Amnesty International qui ajoute que « d’après les données officielles du rapport annuel de l’Union Européenne, depuis 2013, les États membres de l’UE ont accordé 506 licences pour des équipements militaires, pour un montant de 205 millions d’euros, au Mali et au Burkina Faso ».

« La Slovaquie a indiqué avoir livré au Mali 1 000 armes d’assaut, 2 460 fusils et carabines, 550 mitrailleuses, 680 pistolets et revolvers, et 750 pistolets-mitrailleurs. La République tchèque a indiqué avoir livré au Burkina Faso 3 500 fusils d’assaut et 10 pistolets-mitrailleurs, et la France a livré au Mali 1 164 pistolets et revolvers à chargement automatique, 4 fusils et carabines, ainsi que 13 véhicules blindés de combat », a révélé l’organisation.

Amnesty invite les États ( exportateurs et importateurs) à adopter des “garanties strictes” afin d’empêcher que les armes ne soient détournées. «Les armes serbes que nous avons identifiées prouvent une nouvelle fois que les armements vendus à des gouvernements de l région du Sahel risquent de tomber entre les mains des groupes armés violents et d’alimenter un conflit qui ne cesse de s’aggraver » a déclaré Patrick Wilcken, responsable du programme Entreprises, sécurité et droits humains d’Amnesty International.